"Record historique" pour les réseaux de chaleur, timide progression pour les réseaux de froid

Par   Corentin PATRIGEON

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Publié le 28 octobre 2025
© Newheat
Cuve de stockage de la centrale solaire thermique Newheat alimentant le réseau de chaleur urbain de la ville de Pons (Charente-Maritime). Photo d'illustration.
FOCUS. L'enquête 2024 de la Fedene indique une croissance "sans précédent" des réseaux de chaleur. Le froid renouvelable, malgré son rôle dans l'adaptation au changement climatique, a encore du mal à se faire une place dans le bouquet des solutions de rafraîchissement.

Une année record pour les réseaux de chaleur : c'est ce qui ressort de l'enquête annuelle des réseaux de chaleur et de froid réalisée par la branche dédiée de la Fedene (Fédération des services énergie et environnement), en partenariat avec l'association Amorce et sous la tutelle du service des données et études statistiques du ministère de la Transition écologique.

Ces installations ont ainsi enregistré une croissance de 9,3 % et ont livré 32,3 térawatts-heures de chaleur en 2024, "un record historique" pour l'organisation qui le met au crédit "du cadre favorable mis en place par l'État et du choix de nombreuses collectivités de privilégier les réseaux de chaleur comme réponse à la crise énergétique de 2022". L'augmentation continue de l'enveloppe du Fonds chaleur depuis 2021, passée de 370 millions à 800 millions d'euros aujourd'hui, joue également un rôle non négligeable.

La bonne santé des 1.041 réseaux de chaleur est aussi à mettre en regard de la hausse de la consommation d'énergie du parc résidentiel – l'électricité et le gaz n'ayant respectivement progressé que de 0,4 % et 1,1 % –, ce qui confirme la montée en charge de la filière pour répondre aux enjeux d'approvisionnement, de compétitivité et de décarbonation qui se posent depuis la fin des confinements sanitaires et le début de la guerre en Ukraine.

Mobiliser la chaleur fatale des data centers

Selon la Fedene, 2.374 nouveaux bâtiments ont effectivement été raccordés aux réseaux de chaleur depuis 2023. "En dix ans, le nombre de bâtiments connectés aux réseaux de chaleur a enregistré une croissance de 69 % pour atteindre près de 52.450 bâtiments aujourd'hui", souligne l'enquête, qui relève au passage que cet essor "se traduit aussi par la création de nouveaux réseaux et l'extension d'existants, avec 430 km supplémentaires de réseaux en 2024, soit la distance entre Paris et Lyon".

Les installations se verdissent également de plus en plus : leur taux d'énergies renouvelables et de récupération (ENR&R) est passé de 31 % en 2009 – date de création du Fonds chaleur – à 67 % en 2024, ce qui a logiquement amélioré leur bilan carbone, avec une émission moyenne tombée de 184 à 109 grammes de CO2 par kWh de chaleur livrée. De même, alors qu'ils représentaient 12,2 % de la production de chaleur il y a dix ans, le charbon et fioul ne pèsent plus que 1 % du mix énergétique aujourd'hui.

Au-delà de la chaleur fatale issue des unités de valorisation énergétique des déchets (UVE) et des sites industriels, sans oublier la biomasse ou encore la géothermie, la filière espère désormais mettre à profit la chaleur issue des centres de données et des stations d'épuration. Elle déplore toutefois que "ce potentiel demeure largement sous-utilisé" alors que le gisement représenterait environ 90 TWh selon l'Ademe (Agence de la transition écologique).

900 GWh de froid livrés en 2024

Les réseaux de froid bénéficient quant à eux d'une meilleure exposition du fait de la multiplication des vagues de chaleur, qui augmentent de fait les besoins en solutions de rafraîchissement. Leur croissance reste cependant beaucoup plus modeste que celle de leurs équivalents pour la chaleur.

Cinq nouveaux réseaux de froid ont été construits l'année dernière, ce qui porte à 49 le nombre total d'installations, et 204 bâtiments supplémentaires y ont été raccordés, soit une progression de 12 % en un an pour un total de 1.841 sites branchés.

Au total, la Fedene comptabilise "294 km de réseaux de froid qui ont livré 0,9 TWh en 2024", pour une analyse de cycle de vie de 21 grammes de CO2 par kWh de froid livré. Et rappelle que le Plan national d'adaptation au changement climatique (Pnacc) table sur un doublement du froid livré par réseau d'ici à 2030.

Vers un abondement du Fonds chaleur en 2026 ?

Quoi qu'il en soit, l'organisation espère pérenniser cette dynamique malgré l'instabilité politique et le brouillard économique dans lequel sont plongées les filières ENR. La troisième Programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE), qui ne s'est toujours pas traduite en bonne et due forme, prévoit d'abord 52,7 TWh de chaleur livrée par les réseaux en 2030, dont les trois quarts d'origine renouvelable, puis 90 TWh en 2035, avec 80 % d'ENR&R.

"Ces objectifs devront être confortés par des moyens financiers permettant de concrétiser ces ambitions", plaide la Fedene. Ce qui impliquera concrètement de relever l'enveloppe du Fonds chaleur "au-delà" des 800 millions d'euros, une trajectoire bien prévue dans le projet de loi de Finances pour 2026... pour l'instant.


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