Adaptation au changement climatique : les mesures qui concernent le secteur de l'énergie

Par   Corentin PATRIGEON

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Publié le 11 mars 2025
Compte X d'Agnès Pannier-Runacher
Agnès Pannier-Runacher, ministre de la Transition écologique, lors de la présentation du Plan national d'adaptation au changement climatique le 10 mars 2025.
TRANSITION. La ministre de la Transition écologique Agnès Pannier-Runacher a présenté la troisième version du Plan national d'adaptation au changement climatique (Pnacc), censé préparer la France à un réchauffement de +4°C d'ici à 2100. Parmi la cinquantaine de mesures dévoilées, plusieurs concernent le froid renouvelable, la GTB et les études techniques. Les fédérations professionnelles ont réagi aux annonces.

C'était un document attendu de longue date par les professionnels de l'énergie et de l'environnement, au même titre que la troisième version de la Stratégie nationale bas-carbone (SNBC) et de la Programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE).

Ce 10 mars 2025, la ministre de la Transition écologique Agnès Pannier-Runacher a présenté le nouveau Plan national d'adaptation au changement climatique (Pnacc), censé préparer la France à un réchauffement de +4°C d'ici à 2100 en tirant des enseignements des phénomènes climatiques survenus jusqu'à présent (canicules, inondations, sécheresses...) et de leurs conséquences économiques.

D'après Roquelaure, le coût des catastrophes climatiques pourrait en effet atteindre 143 milliards d'euros cumulés sur la période 2020-2050 et la France pourrait perdre jusqu'à 10% de son PIB (Produit intérieur brut) au cours des cinquante prochaines années si la température mondiale augmente de 2°C. Dans le même temps, le surcoût des assurances lié au changement climatique pourrait grimper de 35% d'ici à la moitié du siècle.

Il y a donc urgence à se préparer dès maintenant, pour Agnès Pannier-Runacher : "Ce plan national d'adaptation doit être notre boussole pour affronter les défis qui se dressent devant nous. Pour cela, je souhaite qu'il soit décliné au plus près du terrain, en travaillant main dans la main avec tous les acteurs locaux, mais aussi tous les ministères concernés par ces enjeux de résilience de nos territoires."

Déployer le froid renouvelable et intégrer le confort d'été aux rénovations

Le Pnacc 3 embarque 52 mesures (voir encadré) et "plus de 200 actions concrètes" axées sur la protection de la population, la résilience des infrastructures et des territoires, l'adaptation des activités humaines, la protection du patrimoine naturel et la mobilisation de tous les acteurs. "La version finalisée publiée [ce 10 mars] est le fruit de plusieurs mois de concertation conclue par deux mois de consultation publique. Nous avons reçu presque 6.000 contributions, dont 176 cahiers d'acteurs" émanant notamment de fédérations professionnelles, relève la ministre.

Les mesures du Pnacc 3 qui concernent le secteur de l'énergie :

- Adapter les logements au risque de forte chaleur

- Déployer à grande échelle les technologies de froid renouvelable

- Intégrer les enjeux d'adaptation au changement climatique dans l'ensemble des rénovations du parc immobilier de l'État

- Intégrer progressivement la Trajectoire de réchauffement pour l'adaptation au changement climatique (Tracc) dans tous les documents de planification publique

- Intégrer les enjeux de l'adaptation dans toutes les normes techniques

- Mieux prendre en compte l'adaptation dans les financements publics en faveur de la transition écologique dès 2024

- Assurer la résilience du système énergétique

- Intégrer l'adaptation dans les stratégies des entreprises et élaborer une feuille de route par secteur

- Développer les outils et analyses nécessaires aux entreprises pour prévenir les risques d'aléas climatiques avec une cartographie d'expositions

- Mobiliser les solutions d'intelligence artificielle au service de l'adaptation

Plusieurs d'entre elles ont réagi dans la foulée de la présentation du Pnacc, étant donné qu'un certain nombre de mesures concernent les réseaux de chaleur, la GTB ou encore les études techniques. Du côté de la Fedene (Fédération des entreprises de services énergie et environnement), on se félicite de voir que le Gouvernement a retenu le déploiement des technologies de froid renouvelable et l'intégration du confort d'été à la rénovation des bâtiments.

"Nous saluons les ambitions portées dans ce cadre et appelons à une mobilisation collective pour inscrire durablement ces solutions dans les politiques publiques, en particulier en matière de rénovation énergétique et de développement des réseaux de froid renouvelable", a commenté son président, Pascal Guillaume.

D'après la fédération, ces derniers auraient le mérite de mutualiser efficacement la production de fraîcheur tout en réduisant les émissions de gaz à effet de serre. Elle juge aussi "crucial de systématiser l'intégration du confort d'été dans les rénovations énergétiques" en améliorant l'isolation et en adaptant les matériaux.

"Accélérer l'adaptation du logement aux fortes chaleurs"

Les industriels des solutions électriques et numériques du bâtiment, réunis dans la fédération Ignes, saluent quant à eux la volonté de l'exécutif d'inscrire dans le Code de l'environnement la Tracc et accueillent très favorablement le contenu du Pnacc 3.

Il faut dire que le document final reprend leurs principales recommandations : intégrer les travaux de confort d'été, les protections solaires et les brasseurs d'air dans le cadre des mono-gestes de Ma prime rénov' ; intégrer les critères de confort d'été à la définition d'une rénovation performante ; afficher l'indicateur fiabilisé du confort d'été dans le diagnostic de performance énergétique sur les annonces immobilières ; mettre en place une campagne de communication auprès du grand public sur l'installation des protections solaires ; et enfin intégrer le confort d'été parmi les travaux contenus dans le cadre du plan pluriannuel de travaux des copropriétés.

Travailler en vase clos serait dommageable alors que relever le défi de l'adaptation ne pourra se faire que collectivement.

Anne-Sophie Perrissin-Fabert, déléguée générale d'Ignes

Pour le reste, la feuille de route reprend des dispositions déjà envisagées par Ignes, telles que l'amélioration de l'indicateur du confort d'été dans le DPE, la meilleure intégration du confort d'été dans l'audit énergétique, l'intégration des solutions de rafraîchissement dans l'appel à programmes 2024 des certificats d'économie d'énergie, le renforcement de la sensibilisation des Accompagnateurs rénov' et de France Rénov', et la publication d'un guide destiné aux copropriétés pour les aider à concilier l'installation de protections solaires avec le respect des règles architecturales.

"Nous nous réjouissons que le Gouvernement ait entendu les appels à renforcer le Pnacc pour accélérer l'adaptation du logement aux fortes chaleurs", a réagi Anne-Sophie Perrissin-Fabert, la déléguée générale d'Ignes. Sans pour autant lui donner un blanc-seing : "Nous lui demandons sans attendre de réunir ces acteurs, notamment les industriels, pour mettre en œuvre cette feuille de route et, dès maintenant, améliorer l'indicateur confort d'été du DPE. Travailler en vase clos serait dommageable alors que relever le défi de l'adaptation ne pourra se faire que collectivement."

Les ingénieurs demandent plus de moyens

L'inquiétude est en revanche de mise chez Syntec Ingénierie. S'ils accueillent favorablement la publication du Pnacc 3, "un tournant dans la prise de conscience collective" qui consacre "le rôle crucial de l'ingénierie pour la conception de solutions durables et résilientes adaptées", les ingénieurs déplorent cependant "l'absence d'un cadre budgétaire précisément défini pour soutenir le développement des mesures annoncées et assurer qu'elles soient ainsi à la hauteur des ambitions proclamées".

Son président, Michel Kahan, considère que la réussite du Pnacc "dépend d'un cadre budgétaire clair, engageant et de financements durables". Le plan consacre pourtant un abondement du Fonds Barnier de 75 millions d'euros, le portant à 300 millions au total, pour financer les mesures de prévention des territoires, ainsi qu'une "mobilisation inédite" du Fonds vert à hauteur de 260 millions d'euros en direction de l'adaptation au changement climatique.

Pour permettre aux ingénieurs de "mettre en œuvre des solutions adaptées", il faudrait toutefois débloquer des "ressources à la hauteur de l'urgence climatique" et consacrer "un soutien financier fort" à ces objectifs, regrette Syntec. Malgré ses "réserves", la fédération se dit prête à "collaborer avec les pouvoirs publics et l'ensemble des parties prenantes" sur l'application du Pnacc 3.


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