"Le solaire sert de plus en plus de variable d'ajustement"

La filière du solaire photovoltaïque est prise entre deux feux : d'un côté, la belle dynamique dont elle bénéficie ; de l'autre, les revirements politiques qui brouillent ses perspectives industrielles. XPair fait le point avec Daniel Bour, le président d'Enerplan, le syndicat des professionnels de l'énergie solaire.
XPair : Le Gouvernement a mis en consultation publique le dernier jet de la troisième version de la Programmation pluriannuelle de l'énergie. Quel est votre commentaire ?
Daniel Bour : Le dernier texte mis en consultation publique de la PPE prévoit 54 gigawatts de capacités solaires à horizon 2030. C'est 10 GW de moins que ce que l'on attendait. Mais au-delà des projections, ce qui est beaucoup plus gênant à nos yeux, c'est la confusion entre la mise en service et la production des installations solaires d'une part, et l'engagement de l'État d'autre part. Or il faudrait distinguer l'aspect budgétaire de l'aspect énergétique.
Le solaire sert de plus en plus de variable d'ajustement alors qu'il ne représente que 5 à 6% de la production électrique actuelle. Et si on adopte une vision encore plus large, nous allons aussi avoir besoin de capacités de stockage. C'est pourquoi la flexibilité est un sujet qui doit être abordé et qui doit même se voir attribuer des objectifs ; actuellement, il n'en est rien.
Faute de mieux, cette PPE 3 est-elle donc un choix par défaut ?
D. B. : Cela fait deux ans que la filière énergie avance sans PPE. Maintenant, il est grand temps d'en avoir une. Mais nous déplorons que l'ambition 2035 soit incompréhensible, comprise entre 65 et 90 GW. La fourchette doit être rehaussée pour assurer une continuité, car je rappelle que le photovoltaïque ne décolle vraiment que depuis deux à trois ans. En 2025, on devrait effectuer plus de 5 GW de mise en service.
"Le solaire est en ce moment la cible d'attaques bien orchestrées par différents lobbys."
La filière est également vent debout contre le projet de révision de l'arrêté tarifaire pour le segment S21...
D. B. : Le solaire a pour but d'être le plus compétitif possible et d'inscrire sa croissance dans l'autoconsommation. Le S21 a explosé depuis ans grâce au segment résidentiel. Mais avec ce projet de révision de l'arrêté tarifaire, l'État veut cesser son soutien, certes en baissant la TVA pour compenser, mais cela va tout de même créer un décalage et générer un creux d'activité.
Nous demandons donc la mise en œuvre d'un appel d'offres simplifié, avec un volume minimum au démarrage. Que le S21 évolue dans un sens économiquement acceptable, nous l'entendons. Mais beaucoup de professionnels sont inquiets des mesures annoncées. Le solaire est en ce moment la cible d'attaques bien orchestrées par différents lobbys.
L'arrêt des dispositifs de soutien dont vous faites les frais est sans doute motivé par la chasse aux économies...
D. B. : Tout le monde connaît la situation des finances publiques. Nous connaissons les contraintes budgétaires actuelles et nous les comprenons. En revanche, ce que nous ne comprenons pas, c'est pourquoi ces contraintes ne sont pas appliquées de manière homogène dans le secteur de l'énergie.
Actuellement, on a l'impression d'être confronté à une idéologie énergétique, là où il faudrait faire de l'écologie avec une certaine sagesse. Nous voulons un mix électrique, nous voulons garder notre souveraineté et nous voulons décarboner. Les grands principes sont là, et on les approuve.
Pour cela, il nous faut un équilibre des énergies. Mais opposer les énergies, c'est idiot. C'est vraiment l'incompréhension qui domine : nous avons fait des ouvertures, nous avons proposé des choses raisonnables, nos interlocuteurs nous reçoivent et nous écoutent... Mais je ne suis pas sûr qu'ils nous entendent.
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