Entre réglementation européenne et manque de bras, les industriels plongés dans un "brouillard très dense"

Par   Yousra GOUJA

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Publié le 7 octobre 2025
© Yousra Gouja pour XPair
Parmi les enjeux majeurs du secteur CVC mis en lumière lors du colloque annuel de l'AFCE, les politiques européennes, la formation ou encore les compétences.
FOCUS. Parmi les enjeux majeurs du secteur CVC mis en lumière lors du colloque annuel de l'AFCE, les politiques européennes, la formation et les compétences illustrent la difficulté avec laquelle les acteurs de la filière doivent naviguer entre contraintes réglementaires et instabilité économique.

Entre lobbying et réglementation, il n’y a parfois qu’un pas. Russell Patten, directeur général de l’EPEE (European Partnership for Energy and the Environment), a ouvert le colloque 2025 de l'AFCE (Alliance Froid Climatisation Environnement) en rappelant l’importance de la coordination entre associations : "Ce qui se passe au niveau européen a un impact considérable au niveau national. Et vice-versa. Et finalement, qui décide ? Le niveau national ou le niveau européen ?"

Selon lui, l’EPEE, qui représente plus de 40 membres, concentre son action sur la Commission européenne, mais ne néglige pas le lobbying au niveau national. Le dirigeant a aussi insisté sur la complexité des dossiers en cours : "Aujourd’hui, nous devons travailler avec cinq commissaires tout au plus. Ce qui nous réveille la nuit, ce sont les F-Gaz. Ils prévoient des révisions et des impacts potentiels de l’interdiction des PFAS sur les réfrigérants."

Les multiples enjeux réglementaires de la filière CVC pourraient ainsi être résumés à "six propositions qui ont un impact direct sur notre secteur : stratégie chaleur et refroidissement, acte économie circulaire, taxonomie finance durable, plan d’action électrification, durabilité des centres de données et simplification environnementale".

PFAS et HVACR : un brouillard réglementaire persistant

Manon Roussel, également de l’EPEE, est revenue sur la situation des PFAS (per- et polyfluoroalkylées) dans le secteur : "En 2023, deux choix étaient présentés : l’interdiction totale de la fabrication et de l'usage, ou l’interdiction avec des dérogations spécifiques de 5 à 12 ans".

Depuis, la chronologie du processus réglementaire a été jalonné de nombreuses échéances : "En janvier 2023, c’était la proposition de restriction soumise à l’ECHA (European Chemicals Agency) par les cinq pays. Mars-septembre 2023, c’était l’occasion d’une consultation publique de l’ECHA, avec un record de 5.600 commentaires. En janvier 2024, c’était le début de l’évaluation par les comités RAC (Committee for Risk Assessment) et SEAC (Committee for Socio Economic Analysis), où les cinq pays mettent à jour le document de référence. Et en 2027, ce sera la proposition de législation par la Commission, ensuite soumise à une période d’examen courte par le Parlement et les États membres."

La dernière mise à jour, en août 2025, inclut des dérogations pour certains composants en fluoropolymères. "Le brouillard reste très dense et il est difficile pour l’industriel de se projeter. L’ECHA est une agence, pas une institution européenne. Au Royaume-Uni, ils commencent à avoir des préoccupations sans avoir des interdictions. Aux États-Unis, c’est au niveau de certains États seulement", conclut-elle.

Former et attirer les talents

Dominique Cosan, du Snefcca (Syndicat national des entreprises du froid, des équipements de cuisines professionnelles et du conditionnement de l'air), a quant à lui rappelé les tensions sur le marché du travail : "82,70 % des entreprises ont des difficultés à recruter. Notre syndicat évalue les besoins de recrutement à 6.000 par an, hors marché de la pompe à chaleur." Pour répondre aux exigences du règlement F-Gaz III et aux évolutions technologiques, il sera donc nécessaire de renforcer les compétences.

D’après lui, les besoins des entreprises sont d'ailleurs bien plus larges qu'il n'y paraît, comme "promouvoir les fluides éco-naturalisés au sein des entreprises qui ne les maîtrisent pas encore, et valoriser puis capitaliser sur l’expérience des entreprises qui ont déjà réalisé des efforts volontaires pour former leur personnel". Ce qui l'a amené à souligner une nouvelle fois l’importance de la mise à jour des attestations de formation.


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