Ces professionnels du génie climatique qui passent le flambeau

Par   Yousra GOUJA

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Publié le 30 avril 2025
Crédit photo Léa-CFI
François Caugan, enseignant depuis 2004 à Léa-CFI, avec sa classe.
MÉTIERS. Dans un secteur confronté au manque de bras, former les futurs professionnels devient un enjeu. Décryptage auprès de spécialistes du CVC qui transmettent, entre deux chantiers ou en reconversion, leurs savoirs à ceux qui doivent prendre le relais.

Sur les bancs de l'École 19°C, un nouvel établissement de formation en génie climatique ouvert en 2022, Vincent Macaisne, 52 ans, partage désormais son savoir-faire en plomberie-chauffage au sein du BTP CFA d’Ocquerre (Seine-et-Marne), le dernier site ouvert en date. "Depuis quelques années, j'avais envie de transmettre. Aujourd'hui, c’est une satisfaction personnelle", confie-t-il.

Après 25 ans de terrain, il découvre les réalités de l'enseignement : "Avec certains jeunes, il y a une barrière de la langue, d'autres traversent des périodes de mal-être". Alors, pour maintenir l'attention, il privilégie le concret : "On fabrique ensemble".

Et de souligner : "Le matériel pédagogique est parfois meilleur qu’en entreprise", en évoquant les cintreuses hydrauliques ou les entraînantes utilisées en atelier. "Mais s'ils ne maîtrisent pas la technique dès l'atelier, après, ils accumulent les lacunes." La clé selon lui : "Montrer chaque geste de manière simple".

Rester connecté au terrain

François Caugan, enseignant depuis 2004 à Léa-CFI (l'école de la Chambre de commerce et d'industrie de Paris - Île-de-France), en sait quelque chose. "Je n’ai jamais voulu perdre mon geste professionnel." Cela l'a aidé à mieux comprendre ses élèves : "Ce sont eux qui m'ont fait évoluer dans ma manière d'enseigner".

Former sans perdre le geste est aussi le choix d'Henri Delaitre, jeune enseignant fraîchement arrivé au BTP CFA d’Ermont, dans le Val-d'Oise : "Je façonne avec eux. Quand ils réussissent une soudure, ils en sont fiers." Mais il faut sans cesse répéter, corriger : "Respecter les dimensions d'une pièce, ce n'est pas naturel pour eux". Attirer de nouveaux formateurs reste qui plus est un défi.

Les jeunes en formation CVC "savent qu'ils ont un avenir, surtout avec la fin des énergies fossiles".

Sandrine Bruno, formatrice en climatisation au BTP CFA de Marly (Nord)

Dans le domaine spécifique du génie climatique, le nombre d'apprentis de niveau CAP a augmenté de 8,2% en 2022-2023 selon le CCCA-BTP (Comité de concertation et de coordination de l'apprentissage du bâtiment et des travaux publics). Cependant, les centres de formation font face à des tensions de recrutement, notamment en raison des départs à la retraite et des difficultés à trouver des enseignants pour prendre le relais.

François Caugan ajoute : "La rémunération d’un technicien dans le public est bien inférieure à celle d'un technicien dans le privé. Et on pourrait dire la même chose en ce qui concerne les enseignants. Beaucoup n’osent pas affronter une classe : gérer un groupe, c’est un vrai métier."

Yoann Bardoux à l'atelier avec ses apprentis de l'École 19°C. Crédit photo Yoann Bardoux

Mener deux carrières de front est parfois la solution. Yoann Bardoux, artisan plombier-chauffagiste, intervient ponctuellement au BTP CFA d’Ocquerre : "J'assure une semaine par mois au CFA. Avec 24 élèves, dont seulement trois mineurs, on forme surtout des adultes en reconversion."

Miser sur les nouvelles énergies

Les évolutions techniques obligent aussi à repenser les contenus. "En climatisation, tout change chaque année", explique Sandrine Bruno, formatrice en climatisation au BTP CFA à Marly (Nord). Elle insiste : "Ils savent qu'ils ont un avenir, surtout avec la fin des énergies fossiles".

Mais l’apprentissage demande du temps : "Ils doivent comprendre, par exemple, quand installer une pompe de relevage sur un système de pompe à chaleur air-air". Si certains élèves "préfèrent l’entreprise", c’est à l’école qu'ils acquièrent les bases.

"Notre rôle, c’est de les rendre moteurs dans l’entreprise", précise-t-elle. Pour tous, transmettre est néanmoins un engagement personnel. "Quand je vois qu’un ancien apprenti est devenu formateur, c’est une réussite", sourit Vincent Macaisne.


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