Rénovation : pourquoi les écoles sont au cœur de la stratégie de décarbonation des communes
Les écoles au coeur de l'équation énergétique des collectivités territoriales ? C'est en tout cas ce que semble avancer une étude inédite sur la performance énergétique du parc scolaire français, fraîchement dévoilée par le bureau d'études Akéa Énergies (filiale du Groupe Hellio) à quelques mois des élections municipales, et alors que le Gouvernement vise la rénovation de 10.000 établissements scolaires d'ici à 2027 – et 40.000 à l'horizon 2034.
Majoritairement construites avant les années 1950, les 52.000 écoles de l'Hexagone constituent un parc énergivore dont la gestion peut s'avérer délicate pour les communes, tant sur le plan budgétaire avec la hausse des coûts de l'énergie – en 2023, certaines communes ont vu leurs budgets énergétiques doubler, voire quadrupler –, que sur le plan réglementaire avec l'obligation de se conformer aux exigences des décrets tertiaire et Bacs, ainsi qu'à la loi dite "DDADUE" (portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne).
Le chauffage "représente plus des trois quarts des besoins énergétiques d'une commune"
Neuf communes sur dix étudiées par Akéa Énergies comptent moins de 10.000 habitants, ce qui en fait des collectivités de taille modeste pouvant être particulièrement exposées aux fluctuations des marchés de l'électricité et du gaz. "Si le mix énergétique des collectivités est resté stable ces dernières années – environ 60 % de combustibles et 40 % d'électricité –, une part importante de cette électricité (50 à 70 % selon les types de bâtiments) est dédiée au chauffage, qui représente à lui seul plus des trois quarts des besoins énergétiques d'une commune sur la période étudiée", indique le BE.
Les établissements scolaires font partie des typologies de bâtiments les plus énergivores, représentant 29,4 % de la consommation énergétique totale des communes, loin devant les équipements sportifs (16,7 %), les sites administratifs (16,4 %) et les infrastructures culturelles ou de loisirs (10 %). L'échantillon analysé par Akéa Énergies se compose de 2.400 écoles d'une superficie moyenne de 1.450 m² et d'une capacité d'accueil moyenne de 175 élèves. Là encore, le chauffage pèse plus des trois quarts des besoins énergétiques de ces bâtiments, "les exigences de confort thermique étant particulièrement élevées dans les salles accueillant de jeunes enfants".
Pour réaliser ses calculs, le bureau d'études a épluché une soixantaine de bases de données issues des factures d'énergie collectées entre 2018 et 2023 via son logiciel de gestion de l'énergie et des fluides DeltaConso Expert. Il en ressort que la consommation d'énergie des écoles françaises s'est établie par élève à 1.145 kilowattheures d'énergie finale en 2023, soit 180 € par an en énergie et en eau. La difficulté pour les exécutifs locaux étant de concilier leurs problématiques budgétaires avec les obligations réglementaires et les défis sanitaires : "En hiver, les élèves et équipes éducatives subissent le froid dans des salles mal isolées, tandis qu'en été, les vagues de chaleur, de plus en plus fréquentes et intenses, accentuent l'inconfort", souligne l'étude.
Prise de conscience et éco-gestes
"Le parc scolaire français, souvent ancien et peu performant sur le plan énergétique, représente un véritable levier pour la transition énergétique locale", assure Jérôme Lecamp, responsable du pôle DeltaConso Expert chez Akéa Énergies. "Beaucoup d'écoles ont été construites avant 1950 et nécessitent aujourd'hui des rénovations lourdes pour répondre aux objectifs du décret tertiaire et de la loi DDADUE. Dans ce contexte, il est essentiel de combiner un pilotage fin des consommations et une stratégie d'investissement raisonnée."
L'expert rappelle d'ailleurs que "de nombreux dispositifs d'aide – Certificats d'économies d'énergie (CEE), Fonds vert, ÉduRénov ou encore le Fonds chaleur – offrent de réelles opportunités pour abaisser le reste à charge de ces opérations, y compris pour les communes de petite taille". Cela dit, les chantiers de rénovation énergétique des établissements scolaires sont déjà sur une courbe ascendante.
Motivée par une prise de conscience sur la transition énergétique et la mise en place des actions d'économies d'énergie, leur consommation d'énergie par élève aurait ainsi déjà baissé de 10 % depuis 2018. Les 2.400 écoles analysées par l'étude affichent actuellement une performance moyenne de 81 kWh d'énergie finale par m², en conformité avec les objectifs 2030 du décret tertiaire qui fixe une moyenne nationale de 93 kWh/m².
Sensibiliser les usagers
Des circonstances exceptionnelles peuvent expliquer des fluctuations occasionnelles, comme "la fermeture des classes en 2020 liée à la pandémie [de Covid qui] avait réduit la consommation", ou à l'inverse "l'augmentation de la ventilation pour limiter la transmission d'air du virus" en 2021, qui pour sa part "avait entraîné une surconsommation". En 2023, la combinaison du renchérissement des énergies, de la mise en oeuvre des mesures de sobriété énergétique et des premiers chantiers de rénovation ont de nouveau fait diminuer la consommation.
Les communes sont d'ailleurs invitées à se saisir de tous les leviers d'action pour faire baisser leurs factures d'énergie. Le suivi des consommations peut s'accompagner d'une amélioration de l'enveloppe du bâtiment visant à réduire les besoins en chauffage : l'isolation des murs, des toits, des combles et des planchers, ou le remplacement des tuyauteries et menuiseries sont autant de postes à privilégier, selon Akéa Énergies.
Des systèmes CVC vétustes peuvent également laisser place à des installations plus performantes, aussi bien en matière de ventilation que de production d'eau chaude. Modifier le bouquet énergétique pour y intégrer des sources moins gourmandes en ressources et moins émettrices de carbone peut aussi être envisagé, tout comme le paramétrage et la régulation fine des installations, ou tout simplement la sensibilisation des usagers.
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