Possible moratoire sur le photovoltaïque : malgré le démenti de Matignon, la filière ENR reste sur ses gardes

Un frisson a parcouru la filière ENR avant que celle-ci ne soit partiellement rassurée. Selon des informations de nos confrères de Contexte, le Premier ministre Sébastien Lecornu – qui n'a toujours pas nommé de gouvernement ni présenté de projet de loi de Finances pour 2026 – s'apprêtait à publier un décret sur la 3e version de la Programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE), mais prévoyait aussi d'instaurer un moratoire sur les énergies renouvelables terrestres (incluant donc le solaire photovoltaïque) afin de tempérer les ardeurs du Rassemblement national, premier groupe politique à l'Assemblée nationale et farouche opposant des énergies solaire et éolienne.
Dans une interview au Parisien, le nouveau locataire de Matignon a toutefois démenti un tel projet. "Cette information est complètement fausse et mensongère : il n'est pas question de revenir sur nos ambitions énergétiques car la décarbonation est une priorité pour notre souveraineté. Il faut sortir de certaines dépendances", a-t-il affirmé dans les colonnes du quotidien. Avant d'ajouter : "En revanche, comme pour tout euro d'argent public dépensé, aucune rente ne sera tolérée".
Dans une réaction publiée sur LinkedIn, le président du SER (Syndicat des énergies renouvelables), Jules Nyssen, reste malgré tout sur ses gardes. "Cette idée ne sort pas de nulle part. Ceux qui l'ont poussé ne vont pas abandonner leur volonté de contraindre le développement de l'offre d'électricité avec comme conséquence inévitable un renchérissement des factures, un ralentissement de l'électrification et une mise en péril de la décarbonation", peut-on lire.
Le SER était déjà monté au créneau en alertant sur le "profond déni démocratique" que représenterait une telle décision, dans la mesure où "un tel moratoire a été massivement rejeté cet été par 377 députés" et qu'il serait "inconcevable que la PPE s’éloigne à ce point du texte de la proposition de loi Gremillet adopté par les sénateurs".
Pour rappel, l'exécutif a arrêté les grandes orientations de la PPE3 depuis longtemps mais attendait l'issue des débats parlementaires sur cette PPL avant d'acter de manière définitive le décret censé l'officialiser. Entre-temps, la chute du gouvernement de François Bayrou et l'instabilité politique persistante semblent avoir gelé les initiatives en la matière.
Un "'réexamen' des soutiens publics aux ENR" aussi sur la table
"Si cette information devait être confirmée, la politique énergétique de la France vivrait un moment très grave", avait appuyé Jules Nyssen. "Le moratoire imposé par François Fillon en 2010 sur le solaire avait détruit plus de 20.000 emplois. Celui-ci pourrait en détruire bien plus. Comment peut-on imaginer de laisser à tel point le RN définir la politique énergétique de la France ?", s'était interrogé le responsable, avant d'appeler "l’ensemble des formations politiques à réagir pour empêcher un tel désastre".
De son côté, l'association France Renouvelables (qui représente notamment le photovoltaïque au sol) avait carrément pris la plume pour adresser une lettre ouverte à Sébastien Lecornu. Elle y dénonçait ce projet de moratoire ainsi que l'option envisagée par Matignon "de confier parallèlement à des économistes une mission de 'réexamen' des soutiens publics aux ENR".
Pour la présidente de France Renouvelables, Anne-Catherine de Tourtier, "la représentation nationale s’est prononcée très clairement en juin dernier : la PPL Gremillet, qui introduisait un moratoire, a été rejetée par une très large majorité de l’Assemblée nationale. Revenir aujourd’hui, par voie réglementaire, sur une décision prise par le Parlement, nous semble particulièrement surprenant."
La crainte de perdre les investisseurs
Mais au-delà de l'aspect politique, les conséquences économiques et industrielles étaient aussi redoutées par les acteurs des ENR, qui craignaient de perdre la visibilité et la confiance nécessaires à leurs investisseurs.
"La France ne peut pas se permettre de ralentir son effort de décarbonation. L’électrification des usages est une condition incontournable de compétitivité et de souveraineté ; or, retarder le déploiement des ENR terrestres, c’est prolonger une dépendance coûteuse aux énergies fossiles, qui pèse chaque année près de 64 milliards d’euros sur notre balance commerciale", insistait Anne-Catherine de Tourtier.
Elle avait conclu sa missive en demandant au chef du Gouvernement de renoncer à ce projet et proposait de lui présenter les propositions de France Renouvelables "pour limiter le coût des soutiens publics sans compromettre les ambitions de déploiement de la PPE". Un message visiblement entendu depuis.
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