La cybersécurité, l’ombre numérique au tableau de l'énergie solaire
Le développement du solaire s’accompagne d’une numérisation rapide des équipements : onduleurs intelligents, plateformes de supervision à distance, maintenance prédictive… autant d’innovations qui reposent sur des échanges constants de données. Cette interconnexion rend les installations plus efficaces, mais aussi plus exposées. Comme le souligne Richard Loyen, délégué général d’Enerplan, "SolarPower Europe plaide pour l’adoption d’un socle harmonisé de cybersécurité pour le photovoltaïque".
Le rapport publié par l’organisation en avril dernier met en garde contre les risques liés à la décentralisation des systèmes solaires et à l’absence d’une norme européenne claire pour encadrer l’infrastructure numérique du secteur. L’objectif : éviter qu’un défaut de sécurité sur un équipement connecté ne devienne une porte d’entrée vers le réseau électrique.
Richard Loyen rappelle qu’il ne faut pas pour autant céder à la panique : "Il n’y a pas un 'interrupteur central' qui permettrait de déconnecter tous les onduleurs PV en Europe, avec une 'cyber backdoor' dans chaque produit activable depuis un pays tiers". Mais il insiste sur la nécessité de faire appliquer le cadre réglementaire européen, entre la directive NIS2, la loi sur la cyber-résilience et le futur code de réseau de l’UE sur la cybersécurité. Autant d’outils destinés à encadrer les infrastructures critiques comme les installations photovoltaïques.
L’IA, catalyseur de risques et d’opportunités
Mais ces avantages techniques s’accompagnent d’un impératif de sécurité : "Un système PV non sécurisé face aux cyberattaques peut non seulement menacer la continuité des activités du site, mais également servir de passerelle involontaire aux pirates pour accéder aux charges énergétiques ainsi qu’aux plateformes numériques plus larges d'une organisation", prévient-il.
L’IA joue également un rôle croissant dans les logiciels de gestion énergétique. "C’est le cerveau du système, qui contrôle et optimise la production et la consommation d’énergie solaire pour réduire la facture énergétique au maximum", précise Arnold Bourges. Ces outils, capables d’analyser les habitudes de consommation et les prix de l’énergie en temps réel, rendent les foyers plus autonomes – mais leur connexion constante accroît d’autant les surfaces d’attaque potentielles.
Vers une culture partagée de la cybersécurité dans la filière solaire
L’objectif est de sensibiliser à la fois à la sécurité physique (protection des équipements, contrôle des accès) et à la sécurité numérique (mots de passe, API, supervision à distance). Thibaut Grison détaille cette approche : "Nos formations illustrent les risques liés à l’interconnexion entre sécurité physique et cybersécurité, à travers des modules ciblés, des campagnes internes, des vidéos et des simulations d’attaques pour renforcer les réflexes de sécurité", indique-t-il.
Cette dimension humaine rejoint les constats d’Arnold Bourges, qui appelle à "intégrer ces notions dès la formation initiale des installateurs dans les guides d’exploitation et les procédures de maintenance". Il estime que des campagnes de sensibilisation conjointes entre fabricants, assureurs et organismes de certification permettraient d’élever le niveau de vigilance global.
Bientôt un standard européen de la sécurité photovoltaïque ?
La certification CNPP Certified, associée au référentiel APSAD D20, s’impose progressivement comme une référence dans le secteur. Pour Arnold Bourges, "elle structure les pratiques autour de critères objectifs de qualité et de sécurité, reconnus par les assureurs et les autorités publiques". L’intégration récente de critères de cybersécurité dans cette certification marque une étape clé : elle rappelle que la croissance du solaire doit se faire dans une démarche sécurisée et responsable, où la protection des données et des équipements devient la norme.
Richard Loyen partage ce constat : la sécurité numérique doit être pensée dès la conception. "Les principaux fabricants d’onduleurs doivent démontrer que des produits intelligents, sécurisés et interopérables sont la nouvelle norme", insiste-t-il. Et comme le résume Thibaut Grison, "sensibiliser les collaborateurs, c’est la première ligne de défense. Une bonne hygiène numérique vaut souvent mieux qu’un logiciel coûteux mal utilisé."
À mesure que le photovoltaïque devient un pilier de la transition énergétique, la cybersécurité devient une condition de sa crédibilité et de sa résilience. Car dans cette nouvelle ère énergétique, les menaces ne viennent plus seulement du ciel, mais aussi du réseau.
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