Classe 4 : un décret pour réduire les pertes d’énergie dans les réseaux hydrauliques

Par   Yousra GOUJA

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Mis à jour le 20 juin 2025
Publié le 19 juin 2025
Crédit photo Kingspan
Calorifugeage de canalisations avec le produit Kooltherm Pipe Insulation de Kingspan.
DÉCRYPTAGE. Souvent négligée, l’isolation des tuyaux de chauffage et de climatisation dans les bâtiments tertiaires et logements collectifs devient obligatoire à un niveau de performance renforcé. Un décret impose, d’ici à janvier 2027, le passage en classe 4.

Jusqu’à 25% de la consommation énergétique d’un bâtiment peut s’échapper… par les tuyaux. C’est ce que vise à corriger le décret calorifugeage du 22 juin 2023, qui impose, d’ici à janvier 2027, l’isolation en classe 4 des réseaux hydrauliques de chaud et de froid dans tous les bâtiments tertiaires et logements collectifs, qu’ils soient neufs ou existants (l'arrêté est consultable ici).

Une évolution que les professionnels saluent comme un levier sous-estimé mais décisif pour la performance énergétique. "Ce décret vient enfin poser un cadre clair", souligne Denis Petit, ingénieur expert chez Calosoft. "Avec la RE2020, l'exigence de sobriété s'est accrue, mais les équipements, eux, n’étaient pas toujours à la hauteur. Désormais, on harmonise l’exigence sur l’enveloppe et sur les réseaux techniques."

Il insiste : "On ne peut plus se contenter de traiter le bâtiment comme un simple volume. Il faut raisonner système." Laurent Combescot, responsable du développement chez Kingspan Isolation Technique France, ajoute : "Ce qui est nouveau, c’est que l’État regarde enfin les déperditions au niveau des tuyaux, et pas seulement des murs ou des toitures. Passer à une isolation de classe 4 permet de réduire de 23% les pertes de chaleur."

Des réseaux souvent négligés mais essentiels

Cette nouvelle exigence s’applique hors du volume chauffé (ou non refroidi, en froid), en neuf ou en rénovation, et repose sur des classes d’isolants dont la performance thermique est normée. "Avec des matériaux comme le Kooltherm de chez Kingspan, pour les réseaux chauds, on divise presque par deux l’épaisseur tout en atteignant les niveaux requis", poursuit-il.

Le décret impose aussi des pratiques plus rigoureuses. Andrea Morreale, responsable d’affaires chez Isofran, rappelle : "Toute la ligne est concernée. Un bâtiment peut contenir des milliers de mètres de réseaux et plusieurs centaines de points singuliers (coudes, vannes, filtres). C’est autant de zones à préserver des pertes d’énergie très coûteuses. Le seul moyen d’y parvenir est un calorifugeage de qualité."

Réalisation de boîte sur réseau vanne eau glacée. Crédit photo Isofran

Il insiste également sur la nécessité d’une exécution de qualité : "Ce n’est pas une question de matériau ou d’épaisseur, mais de mise en œuvre. Une mauvaise application dégrade les performances de l’installation mais peut aussi avoir des conséquences désastreuses dans le cas de condensation sur des réseaux d’eau glacée."

Inquiétude sur le financement

Outre les bénéfices en consommation, l’intérêt est aussi économique : jusqu’à 2.000 € d’économie par an sur les charges d’exploitation, avec un retour sur investissement de moins d’un an. L’impact sur le confort est également réel. "En été, des tuyaux d’eau chaude mal isolés réchauffent des parties communes déjà surchauffées. On le sent dans les ascenseurs", illustre Laurent Combescot.

Pour Denis Petit, cette évolution est aussi structurelle : "Le décret rétablit une cohérence entre les ambitions du bâtiment à énergie positive (RE2020) et les pratiques concrètes. On ne peut pas viser le zéro énergie si on continue à négliger les ponts thermiques techniques." Reste un point d’inquiétude : le financement. Ces travaux sont aujourd’hui pris en charge via le dispositif des certificats d’économie d’énergie (CEE).

Mais leur maintien fait débat. "Si la fiche CEE est supprimée, beaucoup de projets vont être gelés", alerte Andrea Morreale. Un paradoxe pour une mesure qui promet des gains énergétiques concrets, mesurables et immédiats. Pour lui, "la balle est désormais dans le camp des pouvoirs publics. Il faut assurer la continuité des aides pour que cette obligation devienne une opportunité réelle, et pas une charge supplémentaire."


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