La révision de l’article CH35 ouvre la voie aux DRV au R32 dans les ERP

Par   Pascal POGGI

Actualités
Publié le 23 septembre 2025
© Pascal Poggi pour XPair
FOCUS. La nouvelle rédaction de l’article CH35 facilite l’installation de systèmes thermodynamiques utilisant des fluides A2L dans les ERP de la 1e à la 4e famille. Les industriels de la climatisation accentuent par conséquent la prescription de leurs DRV au R32.

Reprenons les choses dans l'ordre. En 2016, la norme mondiale ISO 817 classe les fluides frigorigènes en deux catégories selon leur toxicité : A (faiblement toxique) ou B (toxique), ainsi qu’en quatre groupes en fonction de leur inflammabilité : 1 (non-inflammable), 2 (inflammable), 2L (légèrement inflammable) ou 3 (très inflammable).

Le R410A est ainsi classé A1 : non-toxique et non-inflammable. Mais voilà, il est menacé à très court terme par le règlement européen F-Gaz en raison de son GWP (Global Warming Power ou potentiel de réchauffement global) qui atteint 2088, là où le F-Gaz vise un GWP moyen du parc installé de 400 en 2030. Qu’à cela ne tienne, les industriels ont lancé le R32 (GWP = 675) pour remplacer le R410A dans toutes ses applications, dont dans les DRV (Débit de réfrigérant variable), ces grandes installations centralisées en détente directe où des groupes extérieurs peuvent alimenter plusieurs centaines d’unités intérieures.

Comme les DRV utilisent des canalisations en cuivre en diamètre réduit, tandis que les solutions à eau glacée font appel à des tubes en acier de plus gros diamètre pour alimenter les ventiloconvecteurs dans un bâtiment de bureau ou en hôtellerie, le DRV est devenu la solution de référence en tertiaire, notamment dans les ERP (Établissements recevant du public). Oui, mais voilà : le R32 est classé A2L, non-toxique, mais légèrement inflammable.

Le DRV est devenu la solution de référence pour la climatisation des bureaux, des hôtels, des centres commerciaux et des surfaces de vente. © Pascal Poggi pour XPair

La norme NF EN 378:2017 et l’article CH35

La norme NF EN 378:2017 qui sert à calculer la charge maximale de fluide admissible dans un bâtiment en fonction du type d’installation et de la nature du fluide retenu, a par conséquent été modifiée en 2017 pour tenir compte de cette nouvelle classe 2L qu’elle ne connaissait pas auparavant.

La charge maximale de fluide admissible, à son tour, détermine la puissance maximale de l’installation thermodynamique à détente directe, que ce soit un DRV, un multisplit ou même un monosplit de puissance importante. La même norme précise aussi à quelles conditions il est possible de dépasser le volume maximal de fluide dans le bâtiment, s’il ne permet pas d’atteindre la puissance souhaitée.

Mais tout cela dépend de normes mondiales (ISO) ou européennes (NF EN). Chaque pays européen a en plus le droit de codifier les règles de sécurité que doivent respecter les installations de climatisation. En France, cela relève de l’article CH35 de l'arrêté du 25 juin 1980 portant approbation des dispositions générales du règlement de sécurité contre les risques d'incendie et de panique dans les établissements recevant du public.

Cet arrêté avait été modifié une première fois en 2019 pour tenir compte de la catégorie A2L, alors nouvelle. Il vient de l’être une nouvelle fois car la modification de 2019 avait introduit des exigences qui rendaient trop complexe et trop coûteuse l’installation de systèmes de climatisation au R32 dans les ERP.

Le problème du DRV est le fluide R410A dont le GWP atteint 2088. Il doit être remplacé par le R32 (GWP = 675), mais classé R32, donc soumis à des règles d’installation plus strictes que le R410A classé A. © Pascal Poggi pour XPair

Les nouvelles dispositions de l’article CH35

L’article CH35 porte sur la mise en œuvre de systèmes thermodynamiques équipés de fluides considérés inflammables (classes A2L et A3) au sein d’ERP de 1 à 4. Car oui, il existe une cinquième famille d’ERP. Elle ne relève pas de l’article CH35, mais plutôt du "Guide pratique relatif à la sécurité incendie dans les magasins de vente et dans les centres commerciaux", édition décembre 2017, publié par la Direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises.

Ce guide autorise depuis longtemps l’emploi des fluides inflammables A3, donc a fortiori les fluides A2L comme le R32, dans les ERP de 5e famille et de type M (magasins de vente et centres commerciaux), soit en gros les magasins d’une surface inférieure à 200 m² par niveau.

Le nouveau CH35, pour sa part :

- Réduit à 0,25 m, contre 1 m dans la version de 2019, la zone d’exclusion pour les solutions A23L autour de chaque unité : pas de prise électrique, de luminaire, d’interrupteur, etc.

- L’obligation d’installer un système de ventilation dans un local où se trouve un système utilisant du fluide A2L est désormais fonction du risque d’atteindre la LFL (limite inférieure d’inflammabilité), au lieu d’être systématique dans la version 2019. Le CH 35 précise la nature de ce système de ventilation : "un extracteur d'air mécanique garantissant un taux horaire de renouvellement d'air suffisant pour être en deçà de la limite inférieure d'inflammabilité en sortie d'extraction. Ce dispositif est de catégorie 3 au sens de la directive 2014/34/ UE concernant les appareils et les systèmes de protection destinés à être utilisés en atmosphères explosibles."

- Il demande un dispositif de détection qui, en cas de fuite, déclenche l'extracteur d'air mécanique et coupe la circulation du fluide dans le circuit afin de limiter la durée de la fuite, soit par arrêt complet du système thermodynamique, soit par activation d'une électrovanne. Ce dispositif de détection est composé d'une centrale de détection et de deux capteurs adaptés à la nature du fluide utilisé. Un dispositif d'avertissement automatique signale toute défaillance du système de détection et d'extraction d'air

- Dans son article 5, le nouveau CH35 exige que tous les dispositifs de la chaîne de sécurité doivent être vérifiés et testés au maximum tous les trois ans. La version précédente demandait une vérification détaillée composant par composant.

Il faudra tout de même aussi s’attaquer aux conditions d’installation des climatiseurs, multisplits, monosplits et DRV, dont ne peut pas dire, comme ici sur le Quai Voltaire à Paris, que leur maintenance soit toujours facilitée… © Pascal Poggi pour XPair

Vive les DRV au R32 !

Les industriels de la climatisation, tels que Daikin, Mitsubishi Electric, Toshiba ou Panasonic, accentuent donc la prescription de leurs DRV au R32, dont les conditions d’installation ont été simplifiées et rendues moins coûteuses par le nouveau CH35. Daikin met par exemple en avant l’efficacité énergétique de son VRV-5 (VRV : Variable Refrigerant Volume, une marque déposée), dont le VRV-5 trois tubes au R32, capable de fonctionner en récupération de chaleur lorsqu'une partie d'un bâtiment est chauffée et l’autre, rafraîchie.

Le VRV-5 est disponible de 33,5 kW à 75,8 kW et offre des longueurs de canalisation jusqu’à 1.000 m. Le VRV-5 est déjà conforme aux exigences de la version 2025 de l’article CH35. Il comporte en effet :

- une sonde de détection de fuite intégrée à l’intérieur de chaque unité intérieure,

- un envoi d’alarmes sonores et visuelles depuis la télécommande Madoka,

- des vannes de coupures et d’enceintes ventilées à l’intérieur des boîtiers,

- des codes services pour procéder à des tests à la demande,

- et le démarrage automatique d’une routine de tests permanente de la chaîne de sécurité.

Pour l’instant, les DRV au R32 ne sont pas interdits par le F-gaz, mais ils sont compris dans la baisse générale des autorisations de mise sur le marché des HFC, passant de 42.874.410 tCO2eq en 2025 à zéro en 2050. Il faut donc peut-être réfléchir dès maintenant à un retour des solutions à eau glacée dans les bâtiments tertiaires.


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