Transition : "80 % de la ville de demain existe déjà" ou les bâtiments face au défi de la décarbonation

Par   Corentin PATRIGEON

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Publié le 16 octobre 2025
© Capture d'écran YouTube Rexel France
De gauche à droite : Grégoire Morineaux, directeur stratégie, innovation et achats de Rexel France ; Sébastien Illouz, responsable du pôle efficacité énergétique de la Banque des territoires ; Ludovic Coutant, directeur du programme Advenir ; Edward Arkwright, directeur général d'Altarea ; et Caroline Gattino, responsable des ventes France-Benelux-Maghreb chez Siemens.
DÉCRYPTAGE. Si certains considèrent que l'électrification des bâtiments et des territoires n'est plus un débat, la question des compétences de l'écosystème nécessaire à sa réalisation se pose malgré tout. A fortiori dans un contexte réglementaire contraint.

L'électrification des usages doit-elle dépasser le simple cadre technique pour s'inscrire comme un véritable projet de société ? C'est l'une des nombreuses questions que les professionnels du bâtiment, de l'énergie et du génie climatique se sont posés dans le cadre du salon RexelExpo, qui se tient à Paris jusqu'au 17 octobre 2025. Organisé par le distributeur de solutions d'électrification et d'optimisation énergétique, l'évènement prévoit d'accueillir jusqu'à 25.000 visiteurs.

Un signe d'intérêt dans un contexte de décarbonation de l'économie et de la société françaises : d'après un sondage OpinionWay réalisé cette année pour Rexel, les trois quarts des Français apportent leur soutien à l'électrification et 93 % en voient même au moins un bénéfice concret, qu'il s'agisse de confort, d'économies d'énergie ou de baisse des émissions polluantes.

Mais de nombreux obstacles se dressent encore sur la route de la transition énergétique puisque deux Français sur trois ne savent pas vers qui se tourner pour lancer leur projet. Autant dire que les professionnels ont un rôle à jouer dans une telle situation. "Le bâtiment est un acteur qui produit et interagit avec son écosystème, quand la ville doit dialoguer et être au service du bâtiment, de son usager, tout en étant inclusive et durable", estime Caroline Gattino, la responsable des ventes France-Benelux-Maghreb chez Siemens, à l'occasion d'une table ronde.

Les réglementations, "des opportunités de performance" ?

Pour elle, "les bâtiments existants sont au cœur de la politique énergétique", comme en témoignent des textes tels que les décrets Bacs et tertiaire. "Le cadre est donné. Les textes sont là, reste les actions à mettre en place pour accompagner la filière", poursuit la responsable, considérant ces réglementations comme "des opportunités de performance". Le directeur général d'Altarea, Edward Arkwright, cite quant à lui des exemples de constructions bois, de raccordements à des réseaux de chaleur urbains ou de centres de données.

"L’apport d’infrastructures nouvelles va venir servir la ville existante. En travaillant ces interconnexions avec la ville d’aujourd’hui, on peut la faire évoluer en restant attentif à son modèle économique et aux conséquences environnementales", affirme-t-il. Mais attention à embarquer tous les territoires dans cette transition énergétique : les grandes agglomérations ne sont évidemment pas les seules à être concernées, les villes moyennes et les villages ont aussi besoin d'être connectés et "intelligents".

"Quatre-vingt pour cent de la ville de demain est déjà présente ; l’enjeu c’est de savoir comment on va adapter ce stock", analyse Sébastien Illouz, responsable du pôle efficacité énergétique de la Banque des territoires. Cela passe par exemple par la rénovation de l’éclairage public, les réseaux de chaleur – "très intéressants car ils permettent de verdir la consommation d’énergie d’un bâtiment sans même pénétrer à l’intérieur" – ou la récupération d’énergie fatale des processus industriels.

Miser sur les CPE et la GTB

"Je crois depuis longtemps aux contrats de performance énergétique (CPE) et la GTB y a toute sa place", souligne le responsable. Encore une fois, les acteurs présents autour de la table ont tous admis que les solutions, aussi bien techniques que réglementaires, sont déjà là. Il s'agirait maintenant de monter en compétences pour proposer de meilleures actions en efficacité énergétique. Sujet incontournable du moment, l'intelligence artificielle a évidemment été évoquée à cette fin.

"On parle beaucoup de données, mais de quelles données ?", interroge Caroline Gattino. "L’IA va nous permettre de manager certaines données, en ayant par exemple une alerte prédictive sur la consommation d’énergie d’un bâtiment. Mais l’interopérabilité est souvent négligée alors qu'il faut lier la personne au système." Et quel maître d’œuvre pour ce vaste chantier ?

"Il n’y a pas un maître d'oeuvre mais une équipe, avec un spécialiste sur chaque lot. Il faut s’assurer que le discours soit scientifiquement et techniquement le même pour tous, et que les informations se recoupent, sinon il y a de l’inaction, voire des reports de projets", répond Sébastien Illouz. C'est donc tout un écosystème local, composé d’industriels, d’installateurs et d’acteurs publics, qui doit se mettre en place et offrir son expertise à toutes les tailles d'agglomérations pour permettre à la transition énergétique de se réaliser partout.

"L’électrification n’est de toute façon plus un débat"

"L’électrification n’est pas une fin en soi et n’est de toute façon plus un débat", résume le directeur stratégie, innovation et achats de Rexel France, Grégoire Morineaux. Mais de reconnaître que cela n’est pas toujours évident à mettre en œuvre, surtout "avec une réglementation extrêmement complexe à assimiler".

Malgré tout, "on est dans une filière d’évolution constante de la technologie", nuance le représentant de Rexel. Reste à "accompagner pragmatiquement la filière en simplifiant les choses". Le marronnier de la simplification...


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